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Quel est le rôle de la Cour du Québec dans le droit de rétention d’un véhicule par un garagiste ?

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    JuriSolutions
  • 21 juil.
  • 7 min de lecture

Droit de rétention véhicule



EN BREF


  • Qu’est-ce que le droit de rétention véhicule au Québec ? C’est le droit, pour un garagiste, de conserver un véhicule jusqu’au paiement des réparations. Ce droit est encadré par le Code civil du Québec et limité par la Loi sur la protection du consommateur.

  • Dans quels cas un commerçant perd son droit de rétention ? Lorsqu’il ne remet pas d’évaluation écrite au client avant les réparations, ce qui est une obligation prévue par larticle 168 LPC. Le contrat peut alors être déclaré nul.

  • Quel est le rôle de la Cour du Québec dans ce type de litige ? La Cour du Québec statue régulièrement sur les litiges de petites créances. Elle rappelle que même un différend de 5 000 $ peut donner lieu à des décisions juridiques majeures.

  • Le commerçant peut-il réclamer un paiement si l’estimation n’a pas été donnée ? Non. Le non-respect de cette obligation retire au commerçant le droit de réclamer un paiement et d’exercer son droit de rétention véhicule.

  • Pourquoi cette décision est-elle importante ? Elle confirme que le rôle de la Cour du Québec est non seulement judiciaire, mais aussi éducatif, en rappelant les obligations des commerçants envers les consommateurs.







EXPLICATIONS


Droit de rétention véhicule


Quel est le rôle de la Cour du Québec dans le droit de rétention d’un véhicule par un garagiste ?



Le droit de rétention du garagiste : un levier contractuel encadré par la loi

Lorsqu’un garagiste effectue des réparations sur un véhicule, il peut être tenté de refuser sa restitution si le paiement n’a pas été effectué. Ce mécanisme, connu sous le nom de droit de rétention, est reconnu en droit civil québécois. Toutefois, ce droit n’est pas illimité, surtout lorsqu’il est exercé contre un consommateur. Un jugement récent de la Cour du Québec en division des petites créances, Dubois Fleury c. Entreprises D.M. Léo inc., 2025 QCCQ 1275, met en lumière les limites de ce recours dans un contexte où les obligations de la Loi sur la protection du consommateur (LPC) ne sont pas respectées.


Dans un jugement de la Cour du Québec, division des petites créances, les limites du droit de rétention véhicule ont été clairement rappelées, notamment lorsque le commerçant ne respecte pas la Loi sur la protection du consommateur.


Le cadre juridique du droit de rétention

L’article 1592 du Code civil du Québec (C.c.Q.) prévoit qu’une partie peut retenir un bien appartenant à l’autre tant qu’une créance exigible, liée à ce bien, n’est pas acquittée. 


L’article 1592 du C.c.Q. dispose à cet effet :


« Toute partie qui, du consentement de son cocontractant, détient un bien appartenant à celui-ci a le droit de le retenir jusqu’au paiement total de la créance qu’elle a contre lui, lorsque sa créance est exigible et est intimement liée au bien qu’elle détient. »

Ce droit repose sur plusieurs conditions :


  1. L’existence d’un contrat valide entre les parties ;


  2. La détention légitime du bien par le créancier ;


  3. Une créance exigible ;


  4. Un lien direct (connexité) entre la créance et le bien détenu.


Dans le contexte de l’industrie automobile, cela signifie qu’un garagiste peut, en théorie, retenir un véhicule jusqu’au paiement complet des réparations qu’il a effectuées. 


Ce type de litige est fréquent dans les dossiers de la Cour du Québec en matière civile, particulièrement en lien avec le droit de rétention véhicule après des réparations.Il est important de comprendre que le rôle de la Cour du Québec consiste à évaluer si le droit de rétention du véhicule a été exercé conformément aux dispositions légales et contractuelles.


Toutefois, lorsque le client est un consommateur, ce droit est subordonné aux exigences strictes de la LPC, notamment l’obligation de fournir une évaluation écrite.


Un avocat spécialisé peut vous guider si vous êtes face à un refus de remise du véhicule par le garagiste, notamment devant la Cour du Québec.




L’évaluation écrite : condition préalable à la réclamation de paiement

L’article 168 LPC impose au commerçant de remettre une évaluation écrite avant de procéder à toute réparation, sauf si le consommateur y renonce expressément. L’article 179 LPC ajoute que le commerçant ne peut réclamer un paiement ni retenir le bien réparé si cette exigence n’est pas respectée. Ces règles sont impératives.


L’article 168 LPC dispose ainsi que : 

« Avant d’effectuer une réparation, le commerçant doit fournir une évaluation écrite au consommateur. Le commerçant ne peut se libérer de cette obligation sans une renonciation écrite en entier par le consommateur et signée par ce dernier.
L’évaluation n’est pas requise lorsque la réparation doit être effectuée sans frais pour le consommateur (…) ».



L’article 179 LPC quant à lui dispose que : 


« Malgré les articles 974 et 1592 du Code civil, le commerçant ne peut retenir l’automobile du consommateur :

1. si le commerçant a omis de fournir une évaluation au consommateur avant d’effectuer la réparation; ou ;
2. si le prix total de la réparation est supérieur au prix indiqué dans l’évaluation, à la condition que le consommateur paie le prix indiqué dans l’évaluation; ou ;
3. si le prix total de la réparation est supérieur à la somme du prix indiqué dans l’évaluation et du prix convenu lors de la modification autorisée à la condition que le consommateur paie un prix égal à cette somme. »

Ainsi, même si le garagiste a effectivement réalisé les travaux, le non-respect de l’obligation d’évaluation écrite rend son droit de rétention inapplicable. Il s’agit d’une sanction claire du législateur pour protéger le consommateur contre les abus potentiels liés aux réparations non autorisées ou au coût imprévu.


Le droit de rétention véhicule est donc conditionnel à une transparence totale sur les coûts : sans évaluation écrite, aucun recours de rétention n’est valide.


Toutefois, le fait de fournir une évaluation préparée par un tiers ne saurait être opposé comme une fin de non-recevoir à une demande de paiement du coût des réparations qui sont décrites dans la soumission.¹


Précisons également que le commerçant ne peut opposer son droit de rétention lorsqu’il facture plus que ce qu’il avait prévu dans la soumission.²


En effet, lorsqu’un commerçant remet une soumission ou une évaluation écrite avant d’entreprendre des travaux, ce document constitue une offre ferme sur le prix, conformément à l’article 1385 du Code civil du Québec (C.c.Q.), qui encadre la formation du contrat :


« Le contrat se forme par l’échange de consentement entre des personnes capables de contracter, sauf les exceptions prévues par la loi. »

Dès que le consommateur accepte l’évaluation écrite, le prix devient un élément essentiel du contrat. Toute modification ultérieure doit faire l’objet d’un accord exprès. Le commerçant ne peut unilatéralement augmenter le prix sans informer le consommateur ni obtenir son consentement. À défaut, la modification est nulle.


Cette protection contractuelle s’inscrit dans le rôle de la Cour du Québec qui veille à l’équilibre entre les droits des commerçants et ceux des consommateurs.



 ¹ Garage Montplaisir Ltée c. Courchesne, 2003 CanLII 36720 (QC CQ)   ² Zreik c. 9046-6129 Québec inc., J.E. 2002-1759



Illustration jurisprudentielle : Dubois Fleury c. Entreprises D.M. Léo inc.

Dans cette affaire, le demandeur réclame 5 000 $ à un garagiste, alléguant notamment des malfaçons. Si le tribunal rejette ces allégations faute de preuve suffisante, il constate toutefois que le garage a effectué les réparations sans fournir d’évaluation écrite préalable, et ce à deux reprises. Le commerçant a ainsi contrevenu à l’article 168 LPC.

Le Tribunal conclut que cette violation entraîne la nullité du contrat et oblige le garagiste à rembourser les frais de réparation, peu importe la qualité ou l’exécution des travaux. En outre, il accorde 1 000 $ de dommages-intérêts punitifs en vertu de l’article 272 LPC, soulignant la gravité de la faute et l’importance de dissuader de tels comportements.


Ce jugement de la Cour du Québec renforce l'encadrement juridique du droit de rétention véhicule lorsqu’il est exercé par un commerçant contre un consommateur.


Dans son rôle de justice accessible, la Cour du Québec en division des petites créances clarifie ici que même de petits litiges liés à des réparations automobiles peuvent soulever d’importantes questions de droit.



Conséquences pratiques : pas de réclamation, pas de rétention

Cette décision confirme que le droit de rétention est indissociable de la validité du contrat de réparation. En d’autres termes, un commerçant ne peut ni réclamer un montant ni retenir un véhicule si les conditions de validité du contrat ne sont pas réunies. L’omission de fournir une estimation écrite prive donc automatiquement le garagiste de toute faculté de rétention, peu importe l’ampleur ou la réalité des réparations effectuées.


Les consommateurs qui se retrouvent dans ce type de situation peuvent invoquer ce précédent pour faire valoir leurs droits devant la Cour du Québec.


Ce rôle pédagogique de la Cour permet aussi de sensibiliser les garagistes aux limites de leur droit de rétention véhicule.




Conclusion

Le droit de rétention peut constituer un outil utile pour les commerçants souhaitant se protéger contre le non-paiement. Toutefois, il ne peut être exercé au mépris des règles impératives de protection du consommateur. L’affaire Dubois Fleury rappelle que le respect des obligations légales – et notamment de l’évaluation écrite – est une condition sine qua non pour que le commerçant puisse faire valoir ses droits. 

Ce jugement renforce l’importance de comprendre les conditions d’application du droit de rétention véhicule dans le cadre juridique québécois.

Le rôle de la Cour du Québec s’avère ici central pour encadrer les abus et rappeler les responsabilités des garagistes envers leurs clients.

À défaut, non seulement le garagiste perd son recours, mais il s’expose aussi à des sanctions pécuniaires.




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